«LES [BIENHEUREUSES] TRENTE-DEUX MARTYRES D'ORANGE»
DE J. MÉRITAN ; CHAPITRE 3


CHAPITRE 3 : LES FOYERS RELIGIEUX DES MARTYRS


Les religieuses immolées en haine de la foi, au cours du mois de juillet 1794, appartenaient à des familles religieuses différentes. Le langage populaire, jusqu'en ces derniers temps, ne tenant pas compte de la diversité de leurs berceaux, et ne distinguant pas davantage le lieu de leur naissance, les appela d'un seul nom : Les Religieuses de Bollène. Il y a dans cette inexactitude une part de vérité et un touchant hommage rendu à la cité chrétienne où fleurissait en de si nombreux couvents la vie religieuse. Sans doute, Caderousse, Pernes, Carpentras, Avignon, et en dehors du Comtat et de la Provence, Pont-Saint-Esprit et Sisteron ont eu, dans la phalange de nos trente-deux martyres, leur représentant et leur protectrice. Mais si la sœur Deloye, originaire de Sérignan, vint directement au martyre de la première de ces villes, et si d'autres encore passèrent immédiatement de leurs familles à leur prison, un très grand nombre, vingt-neuf d'entre elles, ou étaient originaires de Bollène ou s'y réfugièrent, lors de la suppression de leur ordre, y menèrent pendant dix-huit mois la vie conventuelle et y trouvèrent comme l'antichambre du martyre. Aussi, là où l'historien distingue et précise, la piété populaire ne distingue pas et ce sera l'éternel honneur de Bollène de voir son nom associé au souvenir de nos bienheureuses, pour leur avoir servi de berceau, ou pour leur avoir offert un asile et un refuge.

L'abbaye de Saint-Benoît érigée et connue dans la région d'Orange et de Caderousse sous le titre de monastère de l'Assomption Notre-Dame fournit la première victime ; le couvent de Sainte-Ursule de Sisteron, en la personne de sa supérieure, la Mère Consolin, clôtura la glorieuse liste. Entre ces deux martyres, dont la première ouvrit et la second ferma l'admirable série, prennent place treize sacramentines, quinze ursulines et deux cisterciennes ; ces deux dernières de l'abbaye de Sainte-Catherine d'Avignon. Les religieuses du Saint-Sacrement venaient toutes du couvent de Bollène, mais parmi les filles de Sainte Ursule, l'angélique sœur Marie-Anne de Peyre arrivait de Carpentras, les sœurs d'Albarède, Cartier, Roussin, Marie-Madeleine de Justamond, Jeanne de Romillon, de Pont-Saint-Esprit, alors que le couvent de Pernes donnait à l'héroïque phalange la sœur Dorothée de Justamond.

Les sanctuaires où s'étaient élevées jusqu'à la sublimité du dernier sacrifice ces âmes d'élite avait été fermés en 1792. Il sera utile de retracer ici, en lignes rapides et en traits sommaires, ce que nous savons de leur histoire, de la ferveur qui y régnait et des épreuves sous lesquelles ils succombèrent.


L'Abbaye bénédictine de l'Assomption Notre-Dame de Caderousse.

En l'année 1652, les religieuses de Notre-Dame des Colonnes de Vienne en Dauphiné, de l'ordre de Saint Benoît, obtenaient licence des consuls et de la communauté de Sarrians, au diocèse d'Orange, d'ériger dans la ville un monastère de leur ordre. Mais cette fondation eut si peu de succès qu'on ne peut trouver trace d'une seule entrée de novice de 1652 à 1666. Aussi, dès 1668 le monastère fut-il transféré à Caderousse, par les soins de la sœur Isabeau de Beaulieu-du-Mazel, qui, d'ailleurs, y arriva et y demeura seule pendant près d'un an.

Isabeau du Mazel avait établi son monastère dans une maison où pendant vingt-sept ans, Jean de Tulles, évêque d'Orange, avait établi le siège de son administration et sa propre résidence, alors que sa ville épiscopale était au pouvoir des huguenots. Le propriétaire en 1669 en était Jean de Tulles, marquis de Villefranche.

Les dames bénédictines en firent l'acquisition pour la somme de 900 livres, mais ne purent en terminer le paiement qu'au 30 mars 1694.

Dès sa fondation, le monastère nouveau fut l'objet des sollicitudes des évêques d'Orange. Mgr Alexandre de Fabri se distingua entre tous par la générosité qu'il y déploya, faisant réparer à ses frais la maison, et y faisant édifier une chapelle qu'il dédia, le 15 août 1672, à l'Assomption de Notre-Dame, alors que le monastère avait jusqu'alors porté le titre de l'Annonciation sous lequel il avait été fondé à Sarrians. Il y plaça un beau reliquaire contenant le chef de Sainte Théodore, don du pape Alexandre VII.

Après quelques années de prospérité religieuse, le monastère connut de dures épreuves. Le lustre que le gouvernement de Mme de Forbin de La Barbein lui avait donné et l'honneur que lui firent en 1701 les enfants de France, en venant visiter l'abbaye et y entendre la messe, n'empêchèrent pas la décadence de se précipiter. En 1753, le 14 novembre, Mme Marie de Sautereau, abbesse, décédait n'ayant reçu, en l'espace de trente-sept ans, aucune novice, et laissant, à sa mort, deux religieuses en tout, dans l'abbaye. Mgr de Tilly, évêque d'Orange depuis 1731, appela alors une de ses sœurs, religieuse bénédictine au Couvent de Saint-Maur, à Yseure, près de Moulins en Bourbonnais. Des contestations s'élevèrent entre le vice-légat Aquaviva et l'évêque d'Orange au sujet de cette nomination. Mais Benoît XIV étant intervenu, sanctionna de son autorité suprême le choix qui avait été fait par Mgr de Tilly, et Geneviève de Tilly, sa sœur, fut bénite par lui le 25 février 1755, et mise en possession réelle et effective de son abbaye. Dans l'intervalle et pendant ces contestations et ces procès, une des deux religieuses était morte : de telle sorte que la nouvelle abbesse eut à gouverner une seule moniale et à administrer, pour tout revenu, 300 livres de pension. La décadence était donc profonde. À toute autre qu'à la nouvelle abbesse elle eût sans doute paru irrémédiable. Mais Geneviève de Tilly n'était pas une âme vulgaire. Dans la détresse où se trouvait son abbaye, un double but s'offrait à son zèle : rétablir la discipline monastique, et recruter de nouvelles novices. À sa prière, son frère, l'évêque d'Orange, fit dresser par un bénédictin, probablement dom Courdurier, un directoire destiné à fournir à la nouvelle abbesse et à ses religieuses une interprétation exacte de la règle de Saint Benoît, adaptée aux convenances d'une communauté renaissante. Sous le titre de Déclarations pour servir de Constitutions aux religieuses de l'Abbaye de l'Assomption à Caderousse, Mgr de Tilly donnait le 10 août 1756 à une maison que, suivant ses propres expressions, «le relâchement et les abus avaient depuis longtemps ébranlé et presque mis à deux doigts de sa perte», un règlement sage, pieux et pratique dont les effets salutaires ne devaient pas tarder à se faire sentir. À dire vrai, le relèvement n'apparut accompli qu'une dizaine d'années après. Mais en 1768, quand Geneviève de Tilly mourut, le monastère où elle avait trouvé une seule religieuse comptait quinze moniales. Cet état de prospérité se maintint pendant plus de vingt ans, sous le gouvernement des trois abbesses, Pierrette Butin, Rose Rollet et Laurence Guérin, qui se succédèrent à la tête de l'abbaye. Le nombre des religieuses diminua cependant quelque peu. De quinze en 1768, il tomba à treize en 1770, et à dix en 1789.

La petite abbaye vivait péniblement à cette époque du revenu de 70 salmées de terre qu'elle possédait dans le territoire de Caderousse, sous la direction de Mme Laurence Guérin, abbesse pour la deuxième fois.

Les bénédictines de l'Assomption furent contraintes en septembre 1792 de quitter leur couvent. Pour la plupart elles rentrèrent dans leur famille. Deux dames respectables, Mlle de Ratriseau et Mme de Fortia, occupèrent les bâtiments du monastère et leur présence, au plus fort de la tourmente, empêcha sans doute la démolition de la chapelle ou des bâtiments [*]. L'abbesse Mme Guérin se retira à Orange où elle exerça pendant et après la Révolution le plus charitable ministère. Elle y devint, en effet, présidente de l'Œuvre de la Grande Miséricorde, à la mort de Mme Guilhe de la Mure, et mourut elle-même le 2 juin 1817. Sur son testament, elle inscrivit l'Œuvre qu'elle avait dirigée pour une libéralité de quatre cent francs.

C'est dans l'abbaye de l'Assomption Notre-Dame que Sœur Marie-Rose (Suzanne Deloye) passa près de trente-quatre ans de vie religieuse. Elle n'en sortit qu'à la dernière extrémité pour se réfugier à Sérignan, dans sa famille d'où elle devait être arrachée, le 10 mai 1794, et conduite le même jour à Orange. Le 5 juillet, elle montait à l'échafaud prouvant, par son sacrifice, la ferveur du monastère où son âme s'était façonnée pour le dernier combat.


Le Couvent du Saint-Sacrement de Bollène.

À la fin du 18ème siècle, la ville de Bollène était la plus importante paroisse du diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Chef-lieu d'une officialité dont relevaient sept paroisses voisines, elle avait eu, en 1727, l'honneur de voir son église, alors simple prieuré, élevée au rang de collégiale. Seize chanoines parmi lesquels on choisissait les dignitaires ecclésiastiques, doyen, capiscol, curé et vicaires, y assuraient l'exercice du culte ou s'y partageaient les sollicitudes pastorales. La Foi au sein du peuple y était vive et la noblesse paraît avoir échappé à la contagion encyclopédique qui empoisonnait alors la plupart des esprits. Aussi les vocations s'y multipliaient et les deux couvents, l'un de Sacramentines et l'autre d'Ursulines, présentaient au moment de la Révolution un personnel nombreux et fervent. Nous verrons des novices admises à la profession jusqu'en 1790, quelques mois seulement avant la fermeture des couvents en France et la dispersion des religieuses.

Le couvent du Saint-Sacrement, où se perpétue de nos jours la ferveur d'autrefois, avait été fondé à Bollène, en 1725, par la Mère Rose du Saint-Esprit Valaille, supérieure du monastère de Marseille.

Voici en quelles circonstances :

Vers la fin du 17ème siècle, la collégiale de Bollène avait pour doyen un prêtre simple, pieux et zélé : l'abbé Péloquin. À ses fonctions canoniales il joignait l'administration spirituelle et matérielle de la paroisse, et prenait le titre de curé. Désireux de donner aux petites filles qui recevaient alors avec les garçons, dans le même local, et par les mêmes maîtres l'instruction primaire, des institutrices et une école spéciales, il fit appel aux jeunes filles pieuses de la paroisse et leur proposa de se consacrer à cette œuvre.

La première qui répondit à son invitation fut une de ses pénitentes de Saint-Restitut [Drôme], Marguerite Hugues, fille de bourgeois aisés, d'une piété éminente et d'un zèle dévorant. Peu après, Louise-Françoise de Roquard se joignit à elle, et une troisième ouvrière se présentait en la personne d'une humble fille qui déjà servait les pauvres dans la maison de charité. Après avoir soulevé bien des difficultés, les consuls donnèrent leur agrément à la fondation projetée. — Pour mieux marquer leur intention et donner à leur œuvre son caractère véritable, Marguerite Hugues et Françoise de Roquard obtinrent l'autorisation de prendre un habit particulier et, le dimanche dans l'Octave de la Nativité de Marie 1720, elles prennent possession de leur nouvelle demeure. L'évêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux leur a donné la permission de porter le nom de Sœurs de Saint-Joseph ; et quelques années après, quand elles eurent désintéressé la ville à qui appartenait par moitié la maison qu'elles occupaient, il leur obtint du vice-légat le privilège de l'érection canonique.

La maison ainsi fondée ne prospéra guère. Le nombre des sœurs était restreint, et la petite communauté se sentait quelque peu isolée. Elle comprenait qu'il lui fallait se rattacher à une famille religieuse plus importante, vivre avec elle en union de bonnes œuvres, de mérites et d'indulgences. Par l'intermédiaire d'un religieux dominicain, le P. Modeste, les Sœurs de Saint-Joseph entrèrent en relations avec l'Institut récemment fondé à Marseille par un religieux du même ordre. La Congrégation des Sœurs du Saint-Sacrement — car tel était son titre — eut pour fondateur à Marseille, le R. P. Antoine du Saint-Sacrement Le Quieu, le saint jour de la Pentecôte 1659.

Moins d'un an après, le 20 mars 1660, l'évêque de Marseille, Mgr du Puget, l'érigeait en congrégation séculière. Ce ne fut qu'en 1694, le 30 octobre, que Mgr de Vintimille, évêque de Marseille, exécutant la commission qu'il avait reçue du pape Innocent XII, le 6 novembre précédent, érigea en monastère régulier la maison des Sœurs et approuva les Constitutions que le P. Antoine avait données à la congrégation naissante.

Les Sœurs du Saint-Sacrement de Marseille vinrent donc fonder le couvent de Bollène. La supérieure de la communauté marseillaise était accompagnée de deux sœurs de chœur et d'une tourière, «toutes animées de l'esprit de leur saint fondateur et possédant toutes les vertus religieuses dans un éminent degré.» Trois jours après leur arrivée, l'adoration perpétuelle fut commencée, pour ne s'interrompre qu'aux plus mauvais jours de la Révolution, mais pour reprendre aussitôt après et parvenir à notre époque, toujours aussi fidèlement pratiquée et conservant sous le rayonnement de l'Eucharistie, dans un monastère qui connut tant d'épreuves, la régularité et la ferveur des premiers temps.

C'est, qu'en effet, dès les premières heures de leur vie régulière, les religieuses donnèrent le spectacle et l'exemple des plus édifiantes vertus. «Quelle était, disent les Courtes notes du monastère, la ferveur, le zèle, la régularité dont les religieuses... étaient animées, nous n'entreprendrons pas de le décrire, n'en étant pas capables. Nos anciennes Mères qui en avaient vu une partie et qui avaient elles-mêmes puisé à cette source, nous le racontaient avec tant de véhémence et d'ardeur qu'il nous semblait être à cette généreuse époque.»

La bénédiction divine avait donné bientôt au monastère naissant une prospérité qui ne fit que se développer jusqu'aux jours de l'épreuve. Le couvent devint trop petit. C'est alors que Dieu lui suscita en la personne de M. de Roquard, l'aîné, un insigne et dévoué bienfaiteur. Officier de cavalerie, seigneur de Vinsobre, Joseph-François de Roquard abandonna sa charge et son rang pour se donner au service de Dieu et des âmes. Mais avant de connaître des jours heureux, le couvent devait porter la marque des œuvres de Dieu, la pauvreté. Quand les fondatrices arrivèrent à Bollène, elles trouvaient en tout et pour tout une maison pour les recevoir. La situation ne les prenait pas au dépourvu. On leur avait écrit quelque temps auparavant : «Pour tout fond, il y a de grandes bénédictions à espérer ; comptez sur la Providence». À peine les trois sacramentines marseillaises étaient-elles installées dans le pauvre héritage des Sœurs de Saint-Joseph, que la Providence vint en effet à leur secours en la personne de M. l'abbé Henri-Benigne de Roquard.

À partir de ce moment, et pendant un demi-siècle, l'histoire du couvent se confond avec celle de la famille de Roquard. À la mort du fondateur, l'abbé Henri-Bénigne, son frère aîné Joseph-François prit sa place à l'aumônerie du couvent, combla la communauté de bienfaits, l'installa dans sa propre maison et mourut comme un saint en 1776. À dire le vrai, le seigneur de Vinsobres et autres lieux revenait de loin. Type achevé du grand seigneur, aimant le faste, le bruit, les aventures, gaspillant avec une magnifique insouciance une fortune très considérable, il n'avait, pendant longtemps, plus donné aucune marque de vocation ecclésiastique. Vint une heure cependant, où la voix de Dieu se fit entendre, Joseph de Roquard se convertit. Une nature comme la sienne ne pouvait s'en tenir là. Hésitant tout de même à se croire appelé au sacerdoce, il trouva auprès de Mgr Jean-Baptiste de Vaccon, évêque d'Apt, les certitudes qu'il cherchait. Le saint évêque le garda près de lui toute l'année 1728 pour l'instruire, et lui conférer en douze mois tous les ordres sacrés. Le 18 septembre il l'ordonnait prêtre dans la chapelle du séminaire d'Apt. Renonçant alors à tout autre bénéfice, l'abbé de Roquard se fit l'aumônier et le confesseur de la communauté, puis étendant sa sollicitude aux besoins matériels du couvent dont il avait le soin spirituel, il n'hésita pas, après la mort de son frère, à convertir sa belle maison en monastère et mourut, après quelques années de cet obscur et sanctifiant labeur, en faisant les religieuses héritières de tous ses biens [].

Une fois installées dans leur nouvelle demeure, les Sœurs du Saint-Sacrement purent donner aisément un plus grand éclat à leur zèle pour le culte de la divine Eucharistie, et si leur ferveur n'en fut pas augmentée, leur action extérieure s'en accrut. Les familles nobles ou bourgeoises de Bollène et des environs leur confièrent volontiers l'éducation de leurs filles et leur maison acquit rapidement cette réputation d'une qualité si haute qu'elle survécut à la Révolution, présida et concourut à la renaissance du monastère et nous est parvenue dans son intégrité et dans sa fleur.

En 1790, la communauté avait à sa tête la Mère du Cœur-de-Marie de la Fare, sœur de Mgr Anne-Louis-Henry de la Fare [1752-1829], alors évêque de Nancy, qui devint plus tard cardinal. Femme douée d'une rare vertu et des talents les moins communs, elle eut l'occasion, au cours de ces terribles années de la Révolution et de la Terreur, de montrer avec la fermeté de son esprit la tendresse de son cœur. Si, parmi tant de naufrages, la congrégation ne périt pas tout à fait, c'est bien, il faut le reconnaître, parce que la Mère de la Fare tint le gouvernail d'une main qui ne sut pas trembler.

À cette époque, la communauté comprenait avec sa supérieure, 22 sœurs de chœur, 5 converses, 2 novices de chœur et 2 tourières. Treize d'entre elles devaient donner leur vie pour Jésus-Christ. Toutes devaient connaître les angoisses de la persécution et rendre témoignage, par la souffrance joyeusement acceptée, aux saints engagements de leur vocation.

Jusqu'en 1792, cependant, la vie des religieuses de Bollène ne fut pas ébranlée. Déjà, les monastères de France étaient fermés et les religieux dispersés, tandis que dans le Comtat encore séparé de là France la vie religieuse continuait. Lorsque l'Assemblée constituante délibéra sur la suppression des vœux et des Ordres religieux, la Mère de la Fare, supérieure des Sacramentines, rédigea à l'adresse de l'Assemblée une supplique, dans laquelle après avoir demandé la conservation de sa communauté et son maintien dans le couvent, elle ajoutait : «Plutôt la mort que l'apostasie.» Cette supplique signée par toutes les religieuses fut transmise à l'Assemblée par le frère de Mme de la Fare, l'évêque de Nancy. On devine le sort qui lui fut fait.

Le Comtat, à peine réuni à la France, le 14 septembre 1792, fut convié à goûter les «bienfaits» d'un ordre de choses auquel il était demeuré jusqu'alors étranger. L'orage dont on entendait la voix toute proche allait fondre sur les couvents encore épargnés et après avoir multiplié dans les environs les catastrophes et les ruines, étendre à nos contrées les ravages de la persécution.

Au mois d'avril 1793, des commissaires sont nommés pour établir dans les districts d'Avignon et de Carpentras l'administration française. À Bollène, le maire et les officiers municipaux sont chargés de faire exécuter les lois révolutionnaires contre les religieuses. Deux mois se passèrent dans les délais réclamés ou suscités par une municipalité encore en partie honnête et chrétienne. Mais il fallut au mois de juin accomplir la mission obligatoire dont la loi chargeait les municipalités et, en conséquence, se présenter aux couvents de la ville, lire aux religieuses le décret de suppression des vœux et des Ordres, les interroger sur leurs intentions et procéder, parmi celles qui devaient demeurer, à l'élection des nouvelles dignitaires.

Les municipaux furent reçus au couvent du Saint-Sacrement par la Mère de la Fare, dont le nom, la naissance et l'esprit ne laissaient pas de leur en imposer. Devant elle, l'interrogatoire des sœurs commença et tandis qu'il se poursuivait, se manifestait l'attachement de chacune à ses vœux et à son monastère. Toutes protestèrent qu'elles préféraient mille morts à la liberté qu'on leur offrait.

L'élection de la supérieure fut un autre sujet d'édification. Tous les suffrages, un seul excepté : le sien, se portèrent sur la Mère de la Fare. La sœur Rose de Gordon, qui comptait quarante ans de profession et devait mourir martyre, fut de son côté maintenue dans sa charge d'assistante.

Il semblait donc que rien n'était changé au couvent et les âmes un moment troublées paraissaient devoir reprendre leur vie de prière, de silence et de paix. En réalité, cette première rafale annonçait la vraie tempête. À dater de ce jour, en effet, les vexations se multiplient : interrogatoires minutieux et fréquents sur l'état de la communauté, inventaire des archives, visites domiciliaires répétées, sans compter les menaces que des voix avinées portaient, entre deux refrains dits patriotiques, jusqu'aux oreilles des religieuses. Puis, coup sur coup, on exproprie le couvent de ses domaines, on en confisque les biens et, comme pour mieux ôter toute illusion sur le sort qui attend la communauté, on vient jusque dans le couvent arpenter et mesurer, sonder les murs et évaluer leur solidité, de telle sorte que les sœurs s'attendaient tous les jours à quitter leur maison et à se voir contraintes à se disperser.

Partout ailleurs, la dispersion était effectuée. Bollène, seule épargnée, apparaissait alors comme un îlot de sainteté et de paix, où bientôt de Pernes, de Carpentras, d'Avignon, de Pont-Saint-Esprit, les religieuses fugitives s'empressent d'aborder. Mais l'asile était précaire et les événements allaient en démontrer toute l'insécurité.

Le 9 octobre 1792, les municipaux se présentent à la porte du monastère, sommant les religieuses d'en sortir. L'administration du district de l'Ouvèze, dont le chef-lieu était à Carpentras, interrogé par la municipalité de Bollène, placée pour lors sous sa juridiction, avait répondu par la plume de son procureur syndic : «Il est certain que la loi est de rigueur et que, depuis le 1er octobre, elles doivent être toutes dehors de leur prison. Mais si, par la citation du décret, elles se trouvent sans location, vous pouvez concilier ce qu'on doit aux lois avec ce qui est dû à la justice et à l'humanité.» Les municipaux de Bollène n'étudièrent pas longtemps les moyens d'opérer cette conciliation. Le lendemain même du jour où ils reçurent cette réponse, le 9 octobre, ils se rendirent aux deux couvents de la ville «à l'effet de faire aux cy-devant religieuses une nouvelle signification de la loi du 17 août, et, de suite, procéder au récolement de l'inventaire... pour voir si rien n'a été soustrait.»

La Mère de la Fare reçut courageusement ce nouveau choc, depuis si longtemps prévu. Elle entendit sans faiblir la notification de la loi et la sommation qui lui fut faite de sortir, elle et ses religieuses, dans le délai de vingt-quatre heures, d'une maison qui à tant de titres lui était si chère et devenait, semblait-il, davantage à l'instant même qu'elle était perdue pour toujours. Son cœur était brisé, mais sa force d'âme, sa lucidité, son sens pratique demeuraient intacts. Elle demanda et obtint un délai de trois jours. Ce furent trois jours d'agonie. «Pendant ce court intervalle, disent les Annales du Couvent, les religieuses eurent la douleur de voir leurs vases sacrés profanés, leur monastère envahi par une troupe de brigands, qui, sous prétexte de faire l'inventaire du mobilier de la maison, emportaient tout ce qui leur faisait plaisir. On laissa seulement aux sœurs la liberté de prendre ce qu'elles avaient dans leurs cellules, ce qui se réduisait à peu de chose. La Rév. Mère Supérieure qui prévoyait les blâmes qu'on ferait tomber sur les communautés religieuses, voulut avant de sortir de son monastère, passer un contrat avec les municipaux de la ville, pour montrer à la postérité que c'était la force et non tout autre motif qui les obligeait à rentrer dans le monde.»

À la douleur de voir profaner la chapelle, envahir la maison et piller les meubles, s'ajouta, pour la Mère de la Fare, le poids de la lutte qu'elle dût soutenir contre ses chères filles qui se refusaient obstinément à quitter le monastère. «Elle prie, elle exhorte, elle dit à ses chères filles que Dieu veut qu'elles sortent de leur retraite, qu'il est temps plus que jamais de s'en faire une qu'on ne puisse pas leur ravir ; mais que pour celle qu'elles habitent, il ne faut plus penser d'y demeurer. Quelle triste nouvelle pour des religieuses qui avaient un si grand amour de leur vocation ! Aussi, malgré leur soumission aveugle aux ordres de leur supérieure, elles ne purent s'empêcher de lui témoigner toute leur peine et d'opposer des résistances pour se soumettre à celui-ci. C'est qu'elles voyaient bien qu'il n'était pas dicté par son cœur et que ce n'était que la force qui l'arrachait de sa bouche. Elles crurent donc qu'il leur était permis d'y opposer des prières...» Ainsi parle l'annaliste du couvent et rien ne nous paraît plus touchant que ce filial entêtement d'une part, et de l'autre cet ordre donné à contre-cœur, maintenu malgré les supplications et les larmes et dont on prépare l'exécution en pleurant soi-même.

Car le dernier mot resta, est-il besoin de le dire, à l'obéissance. Mais il fallut que la Mère de la Fare appelât, pour la première fois, sans doute, au secours de son autorité une aide étrangère. Une religieuse visitandine d'Avignon, Sœur Thérèse-de-Jésus, «grande servante de Dieu, conduite par des voies extraordinaires» eût grâce pour persuader aux sœurs que telle était la volonté de Dieu. «Telle est, leur dit-elle, la volonté de Dieu que vous quittiez ce voile. Pourquoi voudriez-vous le garder ? Vous me voyez hors de mon cloître ; je l'aimais cependant autant que vous aimez le vôtre. Il faut que liées au même époux, vous subissiez le même sort.»

Le 12 octobre, au soir, le sacrifice fut enfin consommé. De grand matin, après une dernière nuit d'adoration, l'aumônier du couvent célébra la messe, dans une chambre, et pour la première fois ne consacra que les hosties nécessaires à la communion des religieuses. — L'abbé Tavernier de Courtines après avoir prêté le serment de Liberté-Égalité, au grand scandale de la communauté qui l'estimait et le regardait comme un saint, s'était hâté de le rétracter dès qu'il avait compris sa faute. Depuis lors, il vivait caché dans le monastère déguisé sous les vêtements du jardinier, continuait, grâce à mille petites ruses et à certaines complaisances des voisins qui ne pouvaient rien ignorer de cette transformation, à donner ses soins aux religieuses. Il demeura, après leur dispersion, leur conseiller et leur chapelain et sa mémoire est demeurée en bénédiction dans la communauté.

Il communia donc chacune des sœurs, les exhorta, les encouragea à la persévérance dans leur sainte vocation et leur assigna le ciel comme leur dernier rendez-vous. La journée se passa en préparatifs. Vers le soir, il fallut quitter l'habit religieux et prendre des vêtements séculiers. C'est avec des soupirs dans la voix, des larmes dans les yeux, que les sœurs échangèrent contre la livrée du siècle l'austère parure de leurs noces spirituelles, mais en abandonnant l'habit symbolique dans lequel elles avaient vécu, et espéraient être ensevelies, elles emportaient les vertus dont il fut le signe et la résolution d'une fidélité à toute épreuve à la vocation dont il était la marque.

La nuit venue, la communauté se réunit une dernière fois à la chapelle. Profanée et vide, elle offrait le spectacle de la désolation. Après avoir prié quelques instants devant le tabernacle dévasté, les martyres — car il est déjà temps de leur donner ce nom — se firent leurs adieux. Puis, elles se séparèrent et en petits groupes franchirent le seuil du monastère pour rentrer dans le monde. Les unes furent recueillies par des familles amies, d'autres retrouvèrent leur foyer, mais le plus grand nombre se retira dans la maison louée par la supérieure, où la vie conventuelle n'allait pas tarder à refleurir.

La Mère de la Fare, elle, quitta son couvent la dernière. Debout sur le seuil, elle protégeait le départ de ses filles et, maternelle autant que virile jusqu'au bout, s'assurait que l'asile prévu pour chacune était prêt à la recevoir. Pour elle, malgré les instances de la marquise de la Fare, sa mère, qui la désirait près d'elle à Pont-Saint-Esprit, se refusant à abandonner son troupeau, elle voulut gagner la maison où la communauté devait se reconstituer. Mais, en franchissant le seuil de son cher monastère, brisée par les luttes des derniers mois et par les émotions de la journée, elle se sentit défaillir et c'est évanouie et sans connaissance qu'on dut la transporter dans sa nouvelle demeure.

Quant à la maison qu'elles avaient depuis plus de deux siècles, elles ou leurs aînées, peuplé de leurs prières et sanctifié de leurs pénitences, elle connut les pires décadences. Convertie en caserne, puis en atelier de poudres et salpêtres, enfin en café, elle fut, après des démarches, dont le récit dépasse les limites de notre sujet, rendue à sa première destination. La communauté s'y reconstitua, la vie religieuse y refleurit, l'adoration perpétuelle y renoua la chaîne de la prière un moment brisée, pour la plus grande édification des âmes pieuses de la ville et du diocèse.

À dater de ce jour de si grande épreuve, commença pour les martyres la montée au Calvaire. Réfugiées dans une maison sommairement installée, elles connurent pendant deux ans les pires angoisses de la pauvreté. «Nos sœurs, dit la relation déjà citée, étaient dans la nécessité de travailler pour se procurer une honnête subsistance : elles faisaient des ouvrages de couture, de broderie, de tricot. Leur digne supérieure travaillait comme les autres et pourvoyait aux besoins de chacune. Cette position, quoique pénible, était néanmoins bien consolante pour elle, puisqu'elle lui donnait la faculté de rester avec ses chères filles...

«Mais le Seigneur, qui voulait épurer la vertu des unes et des autres, permit que la malice d'un municipal contraignit la bonne Mère de la Fare à se séparer de ses chères filles. Elle alla se réfugier à Pont-Saint-Esprit, chez madame sa mère, emmenant avec elle une de ses religieuses la sœur converse du Bon-Ange, Madeleine Cluse.»

Un an s'était, en effet, écoulé depuis la fermeture des couvents de Bollène quand, le 21 octobre 1793, la municipalité arrêta que «dans la huitaine toutes les religieuses étrangères, valides, qui sont dans des maisons à Bollène, auront à évacuer le pays.» Cette mesure spécialement dirigée contre la Mère de la Fare dont l'influence et l'autorité plus considérables que jamais étaient pour les révolutionnaires une gêne perpétuelle, eut encore pour effet d'obliger les Sacramentines étrangères à regagner leur pays natal. Elles ne partirent pas toutes cependant et il est à croire que les exécuteurs de l'arrêté municipal, satisfaits du départ de la supérieure, fermèrent les yeux sur le séjour des autres religieuses, moins redoutables à leurs yeux que la Mère de la Fare.

Sœur Aimée-de-Jésus (Rose de Gordon), assistante, prit la direction de la communauté. Les privations et les souffrances se multipliaient et la situation était des plus tristes. Les Annales du Couvent nous en ont laissé cet affligeant tableau :

«Malgré leur assiduité au travail, les sœurs avaient beaucoup de peine pour subvenir à leur frugale nourriture et à leur modeste entretien. Il ne serait guère possible de décrire tout ce qu'elles eurent à souffrir de la faim et du froid. Elles allaient par les chemins, sur les montagnes, ramasser du bois, de la paille, pour faire leur soupe et leur lessive. Enfin, la privation où elles étaient de toutes les choses nécessaires à la vie fut cause que plusieurs d'entre elles décidèrent d'aller chez leurs parents. — Celles de nos sœurs qui continuèrent à vivre en communauté à Bollène et c'était le plus grand nombre, attiraient sur elles les regards du céleste Époux, par leur ferveur et leur générosité à supporter toutes les privations auxquelles leur triste position les soumettait. Le Seigneur qui en destinait un grand nombre à la gloire du martyre, les préparait depuis longtemps à cette grâce par les sacrifices qu'il leur imposait journellement.»

Ces sacrifices journaliers dont parle en termes si touchants l'annaliste de la communauté allèrent parfois jusqu'à la détresse. Le chevalier de la Fare, oncle de la supérieure, donna un jour sa tabatière d'argent à sa nièce, n'ayant pas autre chose à lui donner, pour en acheter du pain à sa communauté. Mais, ce que les religieuses désiraient le plus ardemment et ce qui était devenu difficile à leur procurer, c'était le pain de l'âme. Les sœurs ne voulant avoir aucun contact avec le curé schismatique qui administrait alors la paroisse n'allaient pas à l'église. Elles auraient été complètement privées de l'Eucharistie sans le dévouement de leur aumônier, l'abbé Tavernier de Courtines. Bien que nommé administrateur du diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux par l'archevêque d'Arles, Mgr du Lau [], et confirmé dans cette fonction par le pape Pie VI, cet ecclésiastique continua auprès des religieuses son modeste office d'aumônier, leur disant parfois la messe, entendant leurs confessions et leur laissant, dans une armoire, la sainte réserve devant laquelle chacune à tour de rôle, faisait une heure d'adoration.

Cette vie intime et fraternelle dont l'épreuve resserrait encore le lien apportait quelque adoucissement à la dureté des temps. Les caractères y perdaient leurs aspérités et une sainte bonne humeur y remplaçait les minuscules froissements de la vie commune.

— Ma mère, disait une jeune sœur, à la maîtresse des novices, vous ne grondez plus !

— Le temps gronde bien assez, répartit maternellement la vénérable religieuse.

Il grondait en effet au sein des plus crucifiantes tribulations, mais la vie régulière se continuait et malgré la fatigue, la faim ou le froid, les admirables religieuses n'en délaissaient pas la moindre observance.

La récompense ne devait pas se faire attendre. Les vierges sages avaient conservé leur lampe allumée : l'Époux allait venir. Parmi ces âmes vigilantes et bientôt empressées au-devant de lui, nous comptons toutes nos martyres. Une seule, Henriette Faurie, cédant aux instances de sa famille, s'était retirée à Sérignan où elle fut, comme nous le dirons dans sa biographie, arrêtée le 10 mai 1794 (quelques jours après son arrivée) et conduite à Orange. Elle devait y rejoindre ses compagnes, dans la prison de la Cure.

Nous verrons au chapitre suivant comment elles furent arrêtées et incarcérées et nous admirerons une fois de plus dans leur vie de prisonnières pour Jésus-Christ, la persévérante action de la grâce et de leur sainte vocation.


Les Couvents de Sainte-Ursule
à Bollène, Carpentras, Pernes, Pont-Saint-Esprit et Sisteron.

Dignes émules des Sacramentines, les filles de Sainte Angèle donnèrent en ces jours d'épreuves les plus magnifiques exemples d'abnégation, et fournirent à la sainte légion seize de ses martyres.

Le couvent de Sainte-Ursule de Bollène datait du commencement du 17ème siècle et avait été fondé par les Ursulines de Valréas. Le Conseil de la ville ne se contenta pas de les accueillir avec toutes les marques extérieures de la sympathie la plus bienveillante : il vota, le 6 octobre 1609, pour les «Ursulines nouvellement arrivées», deux charretées de bois et le louage d'une maison pour un an, à raison de deux écus, attendu que les religieuses enseignent les filles à lire et à écrire.

Aussitôt, les Ursulines se mirent à l'œuvre. À trois vœux de chasteté, de pauvreté, d'obéissance, elles en ajoutaient un quatrième : celui de travailler à l'éducation des jeunes filles. Et l'on vit bientôt que ce n'était point là une vaine formule. La confiance des familles répondit à cette promesse de dévouement et les jeunes filles nobles, aussi bien que les enfants de la bourgeoisie, sollicitèrent avec empressement leur admission au pensionnat. À côté de l'établissement destiné aux plus fortunées, des classes gratuites étaient libéralement ouvertes aux filles du peuple. Ici et là, une instruction suffisamment large et pratique, une éducation chrétienne animée d'une solide piété faisait, des élèves admises à en jouir, des jeunes filles sérieuses et cultivées, capables de tenir leur rang et de faire honneur, par les qualités d'esprit et de cœur, à leur condition sociale.

Le succès des pieuses et sûres méthodes en honneur chez les Ursulines força, en 1629, Madame Dudenis, supérieure de la maison, à transporter ses religieuses dans la maison qu'elle venait d'acquérir de son frère, alors recteur du collège d'Annecy, à Avignon. C'était l'ancien palais des audiences, appelé aussi grande maison du Collège, actuellement l'Hôtel-Dieu. Cette même année, les religieuses groupées jusqu'alors en simple congrégation embrassèrent les constitutions et adoptèrent la règle de la Révérende Mère Jeanne-de-Jésus de Rampalle. Leur couvent fut bientôt des plus florissants. De tous les rangs de la société, les vocations surgirent et le nombre des postulantes et des novices ne le céda bientôt plus à celui des élèves.

La Révolution surprit le couvent des Ursulines de Bollène en pleine prospérité. Il comptait alors, d'après l'inventaire de l'époque, dix-sept sœurs de chœur et six converses. Parmi les premières, nous trouvons les noms les plus honorables, dont quelques-uns si dignement portés de nos jours encore, demeurent malgré les années écoulées, les troubles, les révolutions et les ruines par elles accumulées, familiers et sympathiques à la ville de Bollène et à la région du Haut-Comtat : les de Lisleroy, les de Guilhermier, de Ripert d'Alauzier, de Rocher, de Lachadenette et de Romillon...

Parmi ces saintes filles, quelques-unes devaient donner leur vie pour Jésus-Christ, à savoir : la supérieure, Sœur Saint-Gervais (Anastasie de Roquard), cinq religieuses de chœur et quatre converses. La divine Providence avait fait à la maison de Sainte-Ursule une large part dans la douleur et dans la gloire.

À dater du mois d'octobre 1792, l'histoire du couvent des Ursulines devient semblable à l'histoire des Sacramentines que nous avons essayé de résumer aux paragraphes précédents. Mêmes vexations, mêmes visites et enquêtes domiciliaires, même brutalité de procédés, pour aboutir à l'expulsion et à la vente à l'encan de la maison et du mobilier des religieuses.

Le couvent devint bureau de bienfaisance, puis septier public. Il est devenu enfin l'Hôtel-Dieu, et malgré les modifications, les bouleversements même, apportés à l'ancien bâtiment, il demeure de nos jours l'asile des malades de la région. Les religieuses n'y sont plus. Une municipalité sectaire et bornée les arracha, voici quelques années, du chevet des infirmes. Personne ne s'étonnera si nous affirmons que ceux-ci ne s'en portent pas mieux.

À Sainte-Ursule, comme au Saint-Sacrement, l'orage ne trouva pas la supérieure désemparée et ne réussit pas à la déconcerter. Elle avait, de son côté, prévu le choc : elle l'attendait. Quand il se produisit, elle sut, ne pouvant l'éviter, en amortir la force. Une maison fut louée, où sous la direction de la Mère de Roquard, la communauté se reforma. Les événements l'avaient quelque peu réduite. Mais d'autres maisons les fugitives accouraient. Chassées de leur foyer, elles étaient heureuses d'en trouver un nouveau en tout semblable au premier, mais où les observances régulières prenaient, sous les coups de l'épreuve, une saveur nouvelle.

L'épreuve, en effet, fut de tous les instants et il ne fallut rien moins qu'une inébranlable confiance en la Providence, l'amour de la sainte pauvreté poussé jusqu'à l'héroïsme et sans doute l'instinct secret que l'heure du martyre et de la récompense approchait, pour conserver pendant dix-huit mois, au sein d'une communauté manquant de tout, la ferveur et la régularité des temps plus heureux.

À cette régularité, la Mère de Roquard apportait le concours de son autorité. C'est, d'ailleurs, le propre des âmes fortes de ne point se consumer en regrets stériles et de donner aux événements les plus douloureux, pour les changer en profits spirituels, l'interprétation véritable et le goût des choses voulues de Dieu. La supérieure fut donc vraiment l'âme de sa communauté pendant ces longs mois d'angoisse. Elle demeura, par la noblesse de ses sentiments, la fermeté de ses décisions et la bonté maternelle de son cœur, la vraie mère de ses pieuses filles. Elle le fut jusqu'au bout. Le dimanche 13 juillet 1794, elle donnait sa vie pour Jésus-Christ, en même temps que Marie-Anne Lambert (Sœur Saint-François), montrant en un dernier exemple à ses religieuses, comment on meurt pour Dieu, quand on a eu le bonheur d'être appelées à vivre pour Lui.

Nous possédons peu de renseignements sur les couvents des Ursulines de Carpentras et de Pernes, au moment de la Révolution. À Carpentras, appelées par Mgr Bardi, les religieuses s'établirent d'abord, rue de la Fournaque, puis vinrent habiter en 1627 leur nouveau couvent situé à côté du palais du recteur du Comtat Venaissin, dans la maison que leur donna Étienne de Pol. Elles n'étaient à cette époque, comme leurs sœurs de Valréas et de Bollène, qu'une congrégation séculière. Mais en 1632, le cardinal Alexandre Bichi les établit comme ordre religieux, et leur couvent connut, à partir de ce moment, une ère de prospérité, qui se prolongea, malgré quelques vicissitudes, jusqu'aux jours de la Révolution. En 1792, le couvent comprenait seize religieuses de chœur et deux converses. C'est parmi ces dernières que Dieu choisit une martyre : la bienheureuse Marie-Anne de Peyre (Sœur Saint-Françoise), immolée le 13 juillet, âme angélique, d'une mortification admirable, qui légua, quelques heures avant de mourir, à sa plus chère compagne, Marie Boudon, son cilice et sa discipline, qu'elle appelait ses plus beaux joyaux.

Le couvent de Pernes devait donner à la phalange des martyres la sœur Dorothée de Justamond (Sœur Sainte-Madeleine). Fondé en 1617, par une pieuse et riche dame Félice de Sainte-Marie, veuve de M. de Pichony, il fut établi par la Mère de Cambis-Velleron, ursuline du monastère d'Avignon, qui amena à Pernes, comme premières religieuses, des Ursulines de l'Isle-sur-Sorgue. Après avoir pourvu aux premiers besoins du nouvel établissement, résolu les premières difficultés, Mme de Cambis-Velleron institua Mme Sibylle de Buissy, de Pernes, comme supérieure. La Révolution détruisit, là comme ailleurs, l'ouvrage des siècles. La prospérité du couvent qui avait en 1792, sous la direction de la Mère Marie-Rose Proal, de Pernes, vingt-quatre religieuses de chœur et trois converses ne fit qu'accélérer sa ruine et hâter la dispersion des religieuses, la confiscation et la vente de leurs biens. Il reste aujourd'hui d'importants vestiges des bâtiments ; mais la mémoire de la martyre a survécu à tout le reste. Son sacrifice a donné à sa famille religieuse et au couvent qu'elle habitait une gloire que le souvenir et l'histoire auraient été, à eux seuls, incapables de lui assurer.

C'est aussi le sacrifice de la bienheureuse Marguerite d'Albarède (Sœur Sainte-Sophie) et de ses compagnes qui a donné au couvent des Ursulines de Pont-Saint-Esprit un magnifique lustre. Marie Desdières, une pieuse et humble femme, domestique de Mlle de Broche, obtint, le 14 juin 1610, du père Romillon, jésuite, l'envoi à Pont-Saint-Esprit de quelques Ursulines d'Aix, pour y fonder un couvent. Peu de temps après, la sœur du connétable Albert de Luynes se joignit à elles, leur apportant avec son nom, les influences dont elle pouvait disposer à la Cour, une pension de 1500 livres que Louis XIII lui avait accordée pour la dédommager de l'abbaye de Maubuisson qu'elle avait refusée. En 1628, les lettres patentes royales apportèrent à la jeune communauté confirmation de ses droits. La Mère Anne de Luynes mourut au couvent de Pont-Saint-Esprit, le 27 décembre 1623, mais les privilèges des maisons royales qu'elle lui avait assurés par son crédit tout puissant, le haut renom de distinction, de science et de sainteté que les religieuses conquirent dans la région, avaient fait à l'établissement une situation des plus prospères et des plus enviées. Trente-quatre religieuses de chœur, cinq converses et deux tourières composaient, en 1790, le personnel du couvent.

La Révolution ne le détruisit pas. Elle en fit des entrepôts, et y logea des fonctionnaires. Et la disposition générale des bâtiments a été suffisamment respectée pour qu'il soit possible aujourd'hui encore de rétablir par la pensée le couvent avec ses belles arcades, son escalier monumental, ses précieux fers forgés, ses deux grandes cours, et un ensemble de constructions dont le temps et de maladroits aménagements n'ont pas détruit la belle ordonnance. Mais si les murs demeurèrent debout, les religieuses, après avoir subi les préliminaires de toute proscription — inventaire, procès-verbaux de l'état des lieux, apposition des scellés — durent quitter leur maison. Déjà leur pensionnat était vide, les élèves ayant été rendues à leurs familles. La maison conventuelle se vide à son tour et, le 23 octobre 1792, meubles et effets sont vendus à l'encan pour la somme de 1067 livres 13 sols, et les religieuses sont dispersées.

Elles se réfugièrent où elles purent : quelques-unes revinrent dans leurs familles, mais plusieurs avaient gagné Bollène où, pour le moment, la persécution n'empêchait pas la vie de communauté. Les sœurs Marie-Madelaine de Justamond, Jeanne de Romillon, Marguerite d'Albarède et Anne Cartier, avec les sœurs Roussin, Thune et Fort étaient du nombre. Les quatre premières devaient se joindre au cortège des martyres, la sœur Roussin allait être condamnée à la prison et les deux dernières seraient, à la mort de Robespierre, rendues à la liberté, après avoir subi plusieurs mois d'emprisonnement.

Fondé en 1610, confirmé par lettre patente de Louis XIII en 1621, le couvent de Pont-Saint-Esprit, qui devait sombrer dans la tempête révolutionnaire et ne laisser après lui aucune trace, fut un des plus édifiants parmi les couvents des Ursulines. Des religieuses qui le composaient, aucune ne voulut prêter, le 17 juin 1791, le serment schismatique, aucune ne consentit à déserter sa vocation, à tel point que quelques-unes déjà en sécurité dans leurs familles s'en échappèrent clandestinement pour aller ailleurs, vivre dans leur congrégation et sous la règle qu'elles avaient autrefois embrassée.

Ainsi, de tous les centres de vie religieuse dans nos régions, les élues de Dieu se réunissaient à Bollène. Elles y furent bientôt vingt-neuf, ramenées par la Providence de leurs divers couvents, faisant par leur vie l'édification des âmes pieuses, mais exaspérant de leur présence la rage des persécuteurs. Leur situation empirait tous les jours. Le mois de mai 1794 allait y mettre un terme et préparer les voies immédiates à leur prochain martyre.

Le monastère de Sainte-Ursule à Sisteron avait été fondé, avec le consentement de l'évêque Toussaint de Glandèves, par des religieuses du couvent de Grenoble. Les lettres de fondation furent données par Pierre Scarron, évêque de Grenoble, le 26 mai 1642, à Sœur Anne de la Passion Bon de Saint-Didier, supérieure, qui amena avec elle Sœur Françoise de Sainte-Thérèse du Bois, comme assistante, et quatre autres religieuses. En quittant la maison-mère, la pieuse colonie lui restait attachée par le lien d'une étroite dépendance. Les lettres de fondation portent, en effet, la clause expresse que le nouveau monastère sera tenu de reconnaître celui de Grenoble comme son chef, et de «lui obéir comme les membres obéissent à la tête.»

Les débuts du nouvel établissement furent pénibles et traversés de mille difficultés. Les années s'écoulaient et les fondatrices ne savaient encore où bâtir le monastère. Après des négociations dont l'histoire serait longue et sans intérêt, la première pierre du couvent était posée, le 9 août 1645, sur un terrain où jadis s'élevaient les grandes et belles maisons de Foralpra. Pour obtenir la contenance qui leur était nécessaire, et pour s'assurer un enclos suffisant, les religieuses avaient dû négocier une foule de petits achats de terrain, l'emplacement rêvé étant divisé en une quantité de minuscules jardins...

Tandis que les bâtiments s'élevaient, les fondatrices trouvèrent une généreuse hospitalité dans la maison de Suzanne de Piolle, dame de Reynier et de Curban. Cette demeure si accueillante avait été, quatre-vingt-sept ans auparavant, la première maison de Sisteron livrée aux protestants pour y tenir leur prêche.

La Révolution trouva, au monastère, treize sœurs de chœur et deux converses, ayant à leur tête la Mère Thérèse du Cœur-de-Jésus Consolin, comme supérieure. Du troupeau, confié aux soins de la martyre, deux sœurs infirmes seulement déclarèrent vouloir rentrer dans leur famille. Les autres demeurèrent au couvent.

Le directoire du département leur assigna une pension que la marche des événements le dispensa de payer longtemps. Le 6 août 1791, la chapelle était fermée. Les religieuses organisant un oratoire de fortune ne consentirent pas encore à s'éloigner. Le 10 septembre 1792, seulement, après que les «patriotes» eurent arraché les grilles du chœur pour en forger des piques, les Ursulines se décidèrent à abandonner leur maison, et chacune se disposa à rentrer dans sa famille. La supérieure revint donc à Courthézon, et c'est là qu'on la prit le 23 mars 1794, pour la conduire à Orange, vers le martyre. Elle devait clôre la liste de nos bienheureuses, et donner à ses juges et à ses bourreaux le spectacle et la leçon d'une foi admirable et d'un héroïque courage.


L'Abbaye cistercienne de Sainte-Catherine d'Avignon.

De l'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine d'Avignon devaient venir deux de nos bienheureuses : Marguerite de Justamond (Sœur Marie de Saint-Henri) et Madeleine de Justamond (Sœur du Cœur-de-Marie), deux sœurs que, par surcroît, la fraternité du martyre devait unir dans la gloire.

L'abbaye remontait au milieu du 11ème siècle. C'est en 1060 que la comtesse Oda, dame riche d'Avignon, fonda sur le mont Lavenic, bientôt appelé Montdevergues (mons virginum), un monastère de filles sous la règle de Saint Benoît. Vers 1150, le fondateur de l'Ordre de Citeaux, Saint Bernard, les ayant visités, les réunit, de leur plein consentement, à la famille cistercienne, et leur donna la bure blanche et le scapulaire noir.

Après deux cents ans passés dans leur abbaye de Montdevergues, la contrée étant infestée de bandes de pillards, les religieuses vinrent à Avignon sur les conseils de l'évêque Zoen, qui leur donna, en 1254, sur la paroisse Saint-Symphorien un local, bientôt aménagé en couvent. La nouvelle maison ne paraît pas avoir connu les misères et les embarras des fondations récentes. L'évêque la dote richement, et la comble de telles largesses qu'il a été regardé comme son second fondateur, la première place étant réservée à la comtesse Oda et à l'évêque Rostaing Ier qui avait établi sur la colline de Montdevergues les religieuses bénédictines.

L'exemple donné par l'évêque Zoen fut largement imité par ses successeurs. André de Languissel, le cardinal Anglise de Grimoard et frère du pape Urbain V, pour ne citer que ces deux évêques, comblèrent le monastère de leurs bienfaits.

Les papes eux-mêmes ne résistèrent pas à cette contagion de générosité. Alexandre IV donne au monastère vers le milieu du 13ème siècle le prieuré de Gigognan ; en 1320, Jean XXII unit à l'abbaye la chapellenie de Saint-Pierre, celle des Onze mille Vierges et une troisième fondée par Jean d'Auzillac. Grégoire XI donne aux moniales une maison contiguë à leur chapelle devenue en 1402 par les soins d'Hugues de Montrond une belle église, où affluèrent au cours du temps les dons les plus riches. De belles châsses y abritaient de nombreuses reliques et le trésor de l'église contenait de magnifiques vases sacrés.

Le couvent lui-même avait été agrandi, largement aménagé, et des spacieux jardins lui donnaient, au dire du chanoine de Véras, un surcroît de splendeur.

On se tromperait d'ailleurs en pensant que le monastère Sainte-Catherine oubliait dans son opulence les austérités de la vie religieuse. Si, sacrifiant aux goûts du temps, les abbesses ornèrent volontiers leur maison des agréments que leur permettaient les héritages et les dons se multipliant en sa faveur, elles surent par contre maintenir leurs moniales dans les rigoureuses observances cisterciennes. La communauté nombreuse était fervente et comme les ruches saines et actives elle avait essaimé vers d'autres régions. Sous l'abbatiat d'Anne de Valavoine, l'abbaye Sainte-Catherine avait fondé en 1636, à Manosque, un nouveau monastère de l'Ordre, qui compta bientôt jusqu'à près de quarante religieuses, et demeura de longues années sous l'obédience de maison-mère. En 1789, trente-quatre religieuses composaient la communauté et l'abbesse était Marie Geneviève de Sainte-Croix, élue le 8 février 1784.

De ce passé si édifiant et si glorieux, il ne reste aujourd'hui que des murs désaffectés et livrant avec peine le secret de leur histoire. La chapelle est un entrepôt de chardons pour le peignage des draps ; le monastère morcelé s'est fondu en constructions diverses ; les peintures du chœur des religieuses ont disparu sous le plâtre, et la rue elle-même, où s'élevait l'abbaye, a perdu son nom séculaire de Sainte-Catherine pour prendre celui d'un médecin philanthrope avignonnais.

Un couvent si riche, que l'on croyait beaucoup plus riche encore, fut à la Révolution un des premiers pillés.

En 1790, par ordre de la municipalité révolutionnaire d'Avignon, la maison est envahie, les religieuses dispersées, l'argenterie volée ou vendue, cependant qu'une populace en délire, croyant avoir enfin conquis le bonheur et la liberté, dansait et chantait devant les portes béantes et les meubles rompus.

Les deux sœurs de Justamond avaient regagné Bollène et s'étaient jointes aux religieuses y vivant en communauté. Elles ne devaient le quitter que pour aller avec leurs compagnes, le 2 mai 1794, à la prison de la Cure à Orange, achever, par une captivité dont elles sanctifieraient toutes les heures, leur préparation au dernier sacrifice.

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[Notes de bas de page.]

*  On trouvera l'histoire de l'abbaye dans la brochure de M. l'abbé Blanc, curé-doyen de Caderosse. (Avignon, Aubanel fils aîné — et chez l'auteur.)

†  Un manuscrit appartenant au couvent du Très Saint-Sacrement à Bollène et contenant un recueil de cantiques, dont un certain nombre est dû, sans doute, à la Bienheureuse Théotiste (Élisabeth Pélissier), renferme une dizaine de couplets destinés à fêter une profession (p. 18). Le nom de la professe est inconnu. Mais d'après le texte de la poésie, elle entrait en religion ayant trois enfants reçut le nom de Thérèse. Il est très probable qu'il s'agit de Françoise Barbé-Desplannes, veuve de Paul-Joseph de Roquard dont elle eut trois enfants. Les confiant à sa belle-mère, elle reçut l'habit le 21 avril 1783, à l'âge de 32 ans. Arrêtée avec ses compagnes, elle fut condamnée à la prison jusqu'à la paix. Sortie de prison le 1er février 1795, elle rejoignit la Mère de la Fare quand celle-ci regroupa en 1801 dans le monastère racheté, les cinq religeuses échappées à la Révolution. Après avoir fait partie de la petite colonie sacramentlne qui fonda la maison d'Avignon, elle revint à Bollène et y mourut en 1811.

‡  [Note de l'éditeur.  Jean-Marie du Lau, né le 30 octobre 1738 à Biras dans le diocèse de Périgueux (Dordogne), d'Armand du Lau, seigneur de La Coste, et de Françoise de Salleton, fut chanoine et trésorier de Pamiers, vicaire général de Bordeaux, prieur de Gabillon et agent général du clergé de France en 1770 ; sacré archevêque d'Arles le 1er octobre 1775, massacré aux Carmes le 2 septembre 1792, il fut béatifié par Sa Sainteté le pape Pie XI le 17 octobre 1926.]

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Gravure 2 : L'abbaye bénédictine de l'Assomption
Notre-Dame de Caderousse (porte de la chapelle).

L'abbaye bénédictine de l'Assomption Notre-Dame de Caderousse (porte de la chapelle).



Gravure 3
: Intérieur de la chapelle du Sainte-Sacrement de Bollène.

Intérieur de la chapelle du Sainte-Sacrement de Bollène.



Gravure 4
: Portrait de la Mère De La Fare.

Portrait de la Mère De La Fare.



Gravure 5
: Le Sainte-Sacrement de Bollène (façade intérieure et jardin).

Le Sainte-Sacrement de Bollène (façade intérieure et jardin).



Gravure 6
: Ancien couvent de Sainte-Ursule à Bollène (porte d'entrée de la chapelle de l'hospice).

 Ancien couvent de Sainte-Ursule à Bollène (porte d'entrée de la chapelle de l'hospice).



Gravure 7
: Ancien couvent de Sainte-Ursule au Pont-Saint-Esprit (l'escalier).

Ancien couvent de Sainte-Ursule au Pont-Saint-Esprit (l'escalier).



Gravure 8
: Ancien couvent de Sainte-Ursule au Pont-Saint-Esprit (reste du cloître).

Ancien couvent de Sainte-Ursule au Pont-Saint-Esprit (l'reste du cloître).


«Les trente-deux Martyres d'Orange» :
Index ; Chapitre 4

[Dr R. Peters : rpeters@wissensdrang.com]