«UN COUVENT DE RELIGIEUSES ANGLAISES À PARIS DE 1634 À 1884» ; CHAPITRE 7


CHAPITRE 7 : SUCCESSIONS DES GOUVERNEMENTS, DE 1720 À 1765.

Six Supérieures se succèdent dans l'intervalle des quarante-cinq ans qui s'écoulent entre la mort de Mme Tyldesley et l'élection de Mme Lancaster.

Mme Anne-Francis Throckmorton, 1720-1728.

Son élection. — Mme Anne-Frances Throckmorton, cette maîtresse des novices qui partagea les suffrages en 1714 avec Mme Tyldesley, est appelée à la remplacer. Mais ce n'est pas sans avoir rencontré une concurrente sérieuse dans Mme Marguerite Towneley, alors sous-prieure. Un second tour de scrutin marque la préférence du chapitre pour Anne-Frances, et la sous-prieure est maintenue dans sa charge. C'était le 17 décembre 1720.

Cette élection eut lieu, ainsi que les suivantes, sous une condition que les Constitutions ne connaissaient point.

Mesure relative à la rééligibilité. — Jusque-là les supérieures et les officières étaient indéfiniment rééligibles de quatre ans en quatre ans. Il n'en sera plus ainsi désormais : la même supérieure ne devra pas être réélue plus de deux fois de suite ; mais, après quatre années passées hors de ses fonctions, elle pourra être appelée à les reprendre.

Une réglementation analogue à celle-ci fut ordonnée pour les officières, mais on l'appliqua seulement en 1724.

Sans aucun doute on avait trouvé des inconvénients à la rééligibilité indéfinie. Lesquels ? On ne s'en explique pas dans le Journal. On se contente de dire comment cette modification fut introduite.

Si le procédé dont on usa ne peut pas être regardé comme irrégulier, puisqu'il est mis en œuvre par l'autorité ecclésiastique, il paraît du moins singulier. Ni le conseil ni le chapitre ne prennent part, en tant que conseil et chapitre, à cette décision.

Aussitôt après la mort de Mme Tyldesley, M. Vivant, supérieur de la maison, consulte, une à une, chaque religieuse en particulier. Puis, au moment même du vote, il déclare, en s'appuyant de l'opinion de la majorité, que ce vote ne sera valable que pour deux élections consécutives, et qu'il en sera ainsi désormais pour toutes les élections futures. Du reste, le cardinal archevêque de Paris sanctionna cette décision le 22 décembre suivant, et, quatre ans plus tard, il en fit autant pour les élections des officières (1).

Rien de bien remarquable sous le gouvernement de Mme Anne-Frances.

Mme Mary-Catherine Throckmorton. — Mme Mary-Catherine, nièce de la supérieure, donne des signes de dérangement d'esprit sur lesquels on se méprend d'abord. Elle se met en dehors de la règle, et l'on veut la ramener à l'ordre par la sévérité. À la visite ecclésiastique de 1721, M. Vivant la prive de voix active et passive au chapitre. Mais le médecin consulté déclare que toute contrainte exercée sur elle pourrait avoir les plus funestes conséquences. Elle est envoyée alors au monastère des Bénédictines de Cambrai, Notre-Dame-de-Bon-Secours, où elle meurt en 1792, âgée de 97 ans.

Le cœur de lord Teynham. — Le 13 juin 1721, il se fait au couvent un peu plus de bruit qu'à l'ordinaire. L'église y est tendue de noir, un catafalque y est dressé, des cierges nombreux brûlent autour. Une messe solennelle de Requiem est chantée. On rend ces honneurs funèbres à un mort qui est enseveli dans l'église de Saint-André-des-Arts : lord Teynham, baron et pair d'Angleterre. Mais le cœur du noble défunt vient d'être apporté au couvent par le docteur Ingleton et un prêtre de la paroisse du lord. Celui-ci a voulu que son cœur reposât près de ses enfants. Deux de ses filles, en effet, Mary et Philadelphia-Mary-Magdalen Roper, ont, l'une en 1695, l'autre en 1700, prononcé leurs vœux dans la maison.

Lord Teynham a vécu dans le protestantisme ; mais il a fait son abjuration sur son lit de mort, entre les mains du docteur Ingleton. Celui-ci, en quelques mots, célèbre la conversion du lord, et félicité la supérieure et les religieuses du bonheur qu'elles ont de posséder un si grand cœur. «Lord Teynham, dit-il, a été illustre sans doute par sa naissance et la longue chaîne de ses aïeux ; mais combien a été plus glorieuse pour lui la fin de sa vie, marquée par son retour à la vérité !»

Après la messe et l'absoute, le cœur fut placé dans le mur de la chapelle.

Si nous joignons aux deux faits précédents une décision prise par le chapitre, nous aurons tout ce qui s'est passé de plus important pendant l'administration de Mme Anne-Frances.

Ni Irlandaises ni Écossaises. — Par vingt-huit voix sur trente-cinq, le chapitre statua que, pour conserver la paix et l'union dans un monastère fondé pour les Anglaises et uniquement pour les Anglaises, ne seraient plus admises à y faire des vœux les Irlandaises et les Écossaises.

Cette décision est aujourd'hui complètement tombée en désuétude.

Elle fut motivée par des difficultés qu'avaient causées à ces Dames deux novices irlandaises. Les préjugés nationaux aidant sans doute un peu la prudence, l'exclusion s'étendit jusqu'aux Écossaises. Si l'union politique des trois royaumes était consommée, il s'en fallait de beaucoup que celle des nationalités le fût encore. Or les antipathies de caractères, toujours difficiles à vaincre entre individus de même race, le sont bien plus entre individus de races différentes. Et bien que, dans les couvents, la charité tempère les préjugés nationaux, et qu'on sache se supporter les uns les autres mieux qu'ailleurs, on fait bien, surtout dans les couvents cloîtrés, de ne pas admettre trop de sujets étrangers. Les heurts qui résultent de l'opposition des éducations et des habitudes peuvent amener de regrettables divisions.

C'est à peu près tout ce que nous savons de l'administration d'Anne-Frances.

Elle était fille de sir George Throckmorton, mort en 1705. Elle naquit en 1664 et fit profession le 2 juillet 1687.

Douée d'une piété peu ordinaire, elle mérita, par ses talents et ses vertus, l'estime et la confiance de ses sœurs. En 1706, le 2 du mois d'août, elle succéda à Mme Agatha Tourner dans la charge de maîtresse des novices qu'elle garda pendant seize ans. Puis elle fut élue supérieure deux fois de suite et céda la place, en 1728, à Mme Alipia Witham. Elle mourut le 5 juin 1736, à l'âge de soixante-dix ans, après quarante-sept ans de vie religieuse.

Poésies de Mme Anne-Frances. — Les archives du monastère sont en possession d'un manuscrit contenant trente-trois pièces de poésie de la composition d'Anne-Frances. Ce sont des hymnes en l'honneur des saints et pour les principales fêtes de l'année. Il s'y mêle quelques traductions libres de textes de l'Écriture, et deux ou trois épîtres sur le bonheur de la vie religieuse.


Mme Mary-Alipia Witham, 1728-1736.

Mme Mary-Alipia prit la succession de Mme Anne-Frances.

Elle était fille de sir John Witham, de Cliffe-Hall, et issue du premier mariage de celui-ci avec Élisabeth Standish, la plus jeune des filles d'Edward, Esquire de Standish. Elle entra au monastère de la rue des Fossés-Saint-Victor, en 1697, avec sa sœur Dorothy-Theresa, et toutes deux s'y firent religieuses : Mary en 1699 et Dorothy en 1701. Celle-ci passe absolument inaperçue dans les ombres du cloître, et ne nous apparaît plus que sur son lit de mort en 1742. La première ne reparaît, après sa profession, qu'au moment où elle est élue supérieure. On célèbre pompeusement son jubilé religieux en 1749 ; et elle meurt regrettée de toute la communauté, le 16 octobre 1754, à l'âge de soixante et onze ans.

Ce gouvernement fut l'un des plus paisibles d'entre tous ces paisibles gouvernements qui précèdent la Révolution française. Le fait le plus remarquable qui puisse mériter l'attention est la célébration du premier centenaire de la maison, en 1733.

Le premier centenaire. — Régulièrement ce centenaire devait être célébré le 27 février, veille de la translation des reliques de saint Augustin. Il y avait, ce jour-là, juste un siècle que lady Tredway et ses postulantes avaient pris possession du petit monastère de la rue d'Enfer. Mais on était en Carême, et l'on jugea que les sentiments de pénitence et de tristesse chrétiennes qui remplissent ce saint temps ne devaient pas être troublés par les sentiments de joie, naturellement expansive, inspirés par une fête jubilaire.

Aussi fut-elle renvoyée après Pâques et remise au dernier jour d'avril.

Comme on le pense bien, elle eut surtout le caractère religieux. On s'était étudié à orner avec le plus de pompe possible les murs et les autels de l'église. La partie réservée aux fidèles et le chœur de ces Dames étaient constellés de cierges allumés. On en comptait plus de deux cents, disent les Annales, et sur la partie qui s'ouvrait entre la stalle de la supérieure et celle de la sous-prieure, ils formaient une guirlande éblouissante d'un splendide effet. La grand'messe, les vêpres furent chantées solennellement, et à l'issue des complies, le grand chantre de la métropole, M. Vincent, grand vicaire de l'archevêque, donna la bénédiction du Saint-Sacrement et entonna le Te Deum final.

Un grand dîner, dont les frais furent payés par les bienfaiteurs de la maison et les dames pensionnaires, fut servi dans le parloir de la supérieure. On y invita les prêtres du séminaire anglais et tous les prêtres anglais résidant à Paris. Les élèves du séminaire, qui n'étaient pas dans les ordres, eurent leur part de la fête dans une collation qui leur fut offerte après le Salut.

Les jeunes religieuses prétendirent que le voisinage du couvent ne devait pas rester étranger aux réjouissances de l'intérieur, et elles employèrent toute leur activité à illuminer les fenêtres, les jardins, le clocher et les statues de la Vierge et de saint Augustin, au pied desquelles elles vinrent chanter, le soir, des antiennes et des hymnes pour clore la cérémonie jubilaire. Comme récompense de la peine qu'elles s'étaient donnée, le narrateur de la fête ajoute : «Elles eurent la permission de rester jusqu'à dix heures du soir dans le jardin».

Mort subite de sir William Howard. — Nous ne passerons pas sous silence un fait, qui n'est pas d'une grande importance, mais qui impressionna vivement la communauté, l'année après la célébration de son centenaire.

Le 16 janvier 1731, à la tombée de la nuit, William Howard, comte de Stafford, était venu au couvent pour y voir sa sœur, Mrs Plowden, qui y vivait en qualité de dame pensionnaire.

À peine avait-il mis le pied sur le seuil du parloir de la Révérende Mère Supérieure, qu'il s'évanouit. Cependant il reprit un peu ses sens, et on l'entendit balbutier quelques excuses à l'adresse de Mme Alipia. «Ah ! Madame, disait-il, je crains bien de n'être venu ici que pour vous causer de l'ennui». Ce furent ses dernières paroles. Tous les soins restèrent inutiles. L'aumônier dut se contenter de lui donner l'extrême-onction. Le lendemain matin, à cinq heures, Howard rendit le dernier soupir. L'autopsie montra qu'il était mort d'apoplexie.

Le parloir fut changé en chapelle ardente, où l'on exposa le corps du défunt dans un cercueil de plomb. La nuit, quatre prêtres de la paroisse de Saint-Nicolas veillaient et priaient auprès de lui. Le jour, il était gardé par les religieuses ou d'autres personnes de ses amis et de sa famille.

Le 20, on le transporta à l'église du monastère, dont les murs avaient été revêtus de tentures noires, et au milieu de laquelle s'élevait un catafalque environné de candélabres. Vers dix heures du matin, le curé de Saint-Nicolas, suivi de cent prêtres portant des cierges allumés, vint faire la levée du corps ; et le convoi, en grande cérémonie, se rendit à l'église de la paroisse. Une messe solennelle des morts y fut chantée. On rapporta ensuite la dépouille mortelle du comte au monastère, où elle fut ensevelie dans le chœur des religieuses.

On avait tenu à honneur de garder les restes de William Howard à la maison. C'était un ami ; c'était le parent de plusieurs religieuses ; c'était surtout un homme de bien et un excellent chrétien.

À la manière dont le Journal nous donne ce récit, aux détails minutieux dans lesquels il entre contre sa coutume, on voit que cette mort avait pris les proportions d'un événement dans la communauté. Ce qui l'impressionnait le plus, c'était que le comte avait été frappé subitement.

Une mort subite a toujours été regardée par le chrétien comme un malheur. Chaque soir, dans sa dernière prière, il demande à Dieu la grâce d'en être délivré. Il est bien près d'estimer que cette sortie inopinée de la vie terrestre est un châtiment, et il croit que souvent il en est ainsi. Ne pas pouvoir faire un dernier aveu de ses fautes ; ne pas pouvoir verser sur elles une dernière larme de repentir, ni entendre de la bouche d'un ministre de Jésus-Christ une promesse de pardon ; ne pas pouvoir recevoir la dernière visite du Sauveur comme ami, mais le rencontrer tout à coup comme un juge, c'est une pensée terrible et désolante pour sa foi. Il se rejette alors dans sa confiance en la miséricorde infinie de Dieu. Il se dit que les voies de la Providence sont au delà des vues humaines, et que les mystères de la mort peuvent cacher des mystères de bonté divine ; et il recherche alors, dans la vie du défunt, tous les traits capables de fournir un appui à ses espérances.

C'est ce que faisaient nos religieuses pour se rassurer, et il ne leur était pas difficile d'en trouver des motifs dans la vie de William Howard. «On a toute raison de croire, dit le Journal, qu'il a quitté ce monde pour un monde meilleur ; sa vie a été si chrétienne ; il fut si prodigieusement charitable pour les pauvres ; l'aumône ne couvre-t-elle pas la multitude des péchés ?»

Le jour même des funérailles, le cœur du comte fut porté par M. Green et M. Holden au couvent des Bénédictines de la rue du Champ-de-l'Alouette. Lord William avait là deux sœurs dont l'une était alors supérieure. Mais en 1807, le 14 octobre, ce cœur fut rapporté au couvent des chanoinesses, les Bénédictines étant retournées en Angleterre, et leur couvent de Paris ayant été vendu.


Mme Élisabeth-Thérésa-Pulcheria Throckmorton, 1736-1744.

Mme Élisabeth-Thérésa-Pulcheria Throckmorton succéda à Mme Alipia Witham.

Démission de M. Vivant comme supérieur ecclésiastique. — Le premier fait qui mérite notre attention sous l'administration de cette Dame est la démission de M. Vivant. Il avait été supérieur ecclésiastique de la maison durant trente années, de 1708 à 1738. Se sentant désormais impuissant à accomplir sa tâche, il pria Mme Pulcheria Throckmorton de lui chercher un successeur. Le choix de celle-ci se fixa sur M. Goular, archidiacre et chanoine de l'Église de Paris.

M. Vivant, docteur en Sorbonne, fut successivement curé de Saint-Leu et Saint-Gilles, chanoine de Notre-Dame, pénitencier et grand vicaire, doyen de la collégiale de Saint-Germain-l'Auxerrois, et enfin grand chantre de Notre-Dame. D'abord commensal de l'archevêque de Noailles, l'influence malheureuse de l'abbé Dorsanne sur celui-ci fit tomber en disgrâce l'abbé Vivant, qui fut éloigné de l'archevêché. Il y rentra pourtant à la mort de Dorsanne et fut nommé official et grand vicaire, titres qui lui furent conservés par Mgr de Vintimille, successeur de Mgr de Noailles.

Remarquable par divers écrits théologiques, M. Vivant le fut surtout par sa grande piété et son zèle dans l'accomplissement de ses devoirs. Il doit être mis au nombre des supérieurs qui s'occupèrent le plus activement de la communauté des Anglaises, lui montrèrent le plus d'intérêt et lui ont laissé les meilleurs souvenirs.

Mort de M. Green, aumônier — Le second fait que nous ne saurions passer sous silence est la mort de l'aumônier, M. Lawrence Green.

Nous ne savons rien de sa famille, et les détails nous manquent sur ses antécédents, avant son entrée au couvent comme auxiliaire de M. Lutton.

Son véritable nom était Ward. C'était un prêtre du collège de Douai, ce qui nous fait supposer qu'il dut passer quelque temps comme missionnaire en Angleterre. Ce qui est certain, c'est qu'il était procureur du collège, lorsqu'il consentit à prêter son concours à Edward Lutton dans la direction spirituelle et temporelle de la maison.

Il y remplit pendant trente années les fonctions d'aumônier, et pendant tout ce temps, dit M. Plumerden, qui nous a laissé de son ami une trop courte biographie, il ne cessa d'exciter ses religieuses à la pratique des vertus de leur état par ses pieuses exhortations, et de les édifier par les exemples de sa vie profondément chrétienne et sacerdotale. Comme Thomas Carre, comme Edward Lutton, il donna tous ses soins à l'enseignement catéchistique des jeunes pensionnaires.

Lawrence Green était d'un caractère paisible et doux. Profondément désintéressé, il sacrifiait volontiers ses intérêts à ceux de la communauté. M. Lutton lui avait transmis ses méthodes dans le gouvernement des affaires de la maison. Il ne s'en départit jamais, et il déploya dans leur application un talent remarquable.

La dernière année de sa vie se passa dans des souffrances continuelles et terribles qu'il supporta avec une admirable patience. Le mal croissant de jour en jour, comme M. Green ne se sentait plus capable de remplir ses fonctions, il pria la supérieure de lui chercher un successeur. À partir du commencement de juillet 1741, il fut forcé de garder le lit. Malade d'une hydropisie, des opérations réitérées avaient épuisé complètement ses forces, et il succomba le 16 de ce même mois, après avoir reçu les derniers sacrements. Selon son désir, il fut enterré parmi les pauvres qu'il avait toujours aimés, dans le cimetière de la paroisse ; mais son cœur fut enseveli près de la grille du chœur des religieuses, non loin du grand autel, sous une petite pierre où fut gravée une courte épitaphe qu'il avait rédigée lui-même. Il était dans la soixante-sixième année de son âge et la trente-septième de son sacerdoce.

«Puisse-je mourir de la mort des justes ! dit le biographe en terminant sa notice ; puissent mes derniers moments être semblables aux leurs ! Moriatur anima mea morte justorum, et fiant novis sima mea horum similia (2)!» C'est le cri naturel d'une âme chrétienne, lorsqu'elle se voit précédée dans la tombe par ceux qui ont su profiter de leur vie et la sanctifier. Et dans cette circonstance, c'était faire l'éloge funèbre de M. Green qui, ayant toujours pratiqué avec sincérité toute justice aux yeux des hommes, dut certainement mourir de la mort des justes devant Dieu.

Il fut remplacé par M. Wilkinson, du collège de Douai comme son prédécesseur et préfet de cette maison. Mais celui-ci n'arriva à Paris et ne prit possession de l'aumônerie qu'un mois après la mort de M. Green.


Mme Mary-Alipia Witham, 1744-1752.

Mme Mary-Alipia Witham, que nous avons vue gouverner le couvent de 1728 à 1736, est rappelée à la supériorité par le chapitre, en 1744, et, de nouveau en 1748, pour quatre ans.

Pendant ce second gouvernement de Mme Alipia, le Journal n'inscrit absolument rien qui mérite d'être mentionné. C'est le silence, non pas de la mort, mais de la paix la plus profonde.


Mme Élisabeth-Thérésa-Pulcheria Throckmorton, 1752-1760.

Mme Élisabeth prend de nouveau les rênes de l'administration le 20 novembre 1752. Elle sera réélue en 1756 et mourra le 4 avril 1760, à l'âge de soixante-six ans, après avoir passé quarante-cinq ans en religion.

Elle était fille de Robert Throckmorton, fils de George, et par conséquent elle était nièce d'Anne-Frances dont nous avons parlé plus haut.

Elle avait quatorze ans lorsqu'elle entra au pensionnat du couvent où l'une de ses nombreuses sœurs, Catherine, vint la rejoindre quelque temps après. Le 24 avril 1713, toutes les deux prirent le voile ; et l'année suivante, le 20 octobre, elles prononcèrent leurs vœux. Élisabeth était d'une santé délicate et souffrait d'une infirmité sur la nature de laquelle nous ne sommes pas renseignés. Mais cette considération n'arrêta pas la communauté dans son vote. On prévoyait les services que pourrait rendre un jour un sujet aussi distingué par ses vertus que par ses talents, et d'emblée elle fut admise à la profession. Mais comme son état de santé devait motiver de nombreuses dispenses, le conseil, comme il en avait usé dans d'autres circonstances, voulut d'avance les régulariser ; et, par un acte signé de ses principaux membres, il plaça Élisabeth en dehors de la règle en ce qui regardait certaines austérités incompatibles avec ses infirmités. On n'eut jamais lieu de s'en repentir.

Malgré ses impuissances physiques, nulle religieuse ne sut se rendre plus utile qu'elle dans la maison. En 1728, aux élections des officières qui suivirent celle de Mme Alipia Witham à la supériorité, Élisabeth remplaça Mme Anne Meynell à la procure. Cette charge la conduisit au gouvernement de la maison qu'elle garda huit ans, comme on le sait. Puis elle reprit les fonctions de dépositaire en remplacement de Mme Mary-Ambrose Bowenset les conserva durant tout le second gouvernement de Mme Alipia jusqu'au jour de sa réélection à la supériorité. Trois lignes du Journal nous donnent à comprendre, dans la pénurie des renseignements où il nous laisse sur le compte de Mme Élisabeth Throckmorton, l'étendue de la perte faite par la communauté dans la personne de cette religieuse :«Sa mort, dit-il, fit verser beaucoup de larmes ; sa vie fut un exemple, de toutes les vertus religieuses ; son zèle, pour tout ce qui touche au bien du monastère, fut constant et infatigable».


Mme Mary-Austin-Mabella Bishop, 1760-1765.

Le gouvernement de Mme Mabella Bishop se passe sans aucun incident notable. Il commence avec 26 religieuses ; le recrutement se borne à deux ; il en meurt cinq, et comme Mme Bishop meurt elle-même le 21 juillet 1765, la communauté ne se composera que de vingt-deux membres quand Mme Lancaster sera élue supérieure.

Mme Bishop était fille de l'Esquire Richard Bishop et de Frances Paston, et naquit en 1724. En 1738, elle est amenée au monastère par son oncle, et elle passe trois ans et demi environ au pensionnat. Le 2 octobre 1742, elle prend le voile, puis le 13 février 1744 elle prononce ses vœux. Quand nous aurons dit qu'elle fut surprise par la mort l'année d'après sa seconde élection, et qu'elle avait alors quarante et un ans d'âge et vingt et un ans de religion, on saura d'elle tout ce que nous avons pu en apprendre.

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[Notes de bas de page.]

1.  Ces règlements furent abrogés en 1778.

2.  Num. 3:10.

3.  [À propos, au milieu de l'été de 1760, l'abbé Charles-Michel de l'Épée, le père spirituel de Valentin Haüy, rencontra les jumelles sourdes-muettes dans la rue des Fossés-Saint-Victor ; par le suite, il fonda la première école en France pour des sourds-muets.]


«Un Couvent de religieuses anglaises à Paris» :
Index ; Chapitre 8

[Dr R. Peters : rpeters@wissensdrang.com]